ASSET MANAGEMENT
Maintenance Magazine 168 – mai 2024
I-care, faire plus avec moins
« Nous surveillons aujourd’hui plus de 500.000 actifs dans le monde et ce chiffre ne cesse de croître », lance Maxime Limbourg, VP Marketing chez I-care, l’expert en maintenance prédictive et préventive auprès de clients de diverses industries. « Selon le type de client, nous pouvons réduire les temps d’arrêt des machines de 70% environ. » I-care a développé et fabrique son propre capteur vibratoire connecté sans fil qui surveille un actif au quotidien. « L’étape suivante sera de connecter les données de vibrations aux données de processus. »
I-care utilisait auparavant des capteurs de qualité non connectés. L’entreprise envoyait périodiquement un ingénieur sur place pour collecter les données et établir un diagnostic. En général, cinq à dix pourcents des actifs suivis nécessitaient une analyse plus approfondie. « Avec le nombre croissant de clients, il devient difficile de trouver du personnel qualifié. De plus, les solutions sans fil ont fait leur percée »,
explique Maxime Limbourg. L’objectif est toujours le même : faire plus avec moins. Plus de disponibilité en production, moins de pièces de rechange au magasin, limiter les interventions au strict nécessaire, ni trop tôt ni trop tard. « Détecter les défaillances à un stade précoce permet de planifier des actions en amont pour éviter des pertes de production. Si nous parvenons à éviter ne fût-ce qu’une défaillance de plus avec la solution connectée, nous sommes alors gagnants, et le client obtient des KPI pertinents de son actif. »
Sans fil et connecté
I-care compte une quarantaine de collaborateurs en R&D. L’entreprise a conçu et développé un nouveau capteur vibratoire piézoélectrique en Belgique. Un collègue a conçu l’élément piézo en interne. CEPYA Electronics, l’entreprise d’Assesse près de Namur, rachetée par I-care en septembre 2023, a développé la carte électronique. Seule la batterie n’est pas produite par I-care. « Nous détenons un brevet sur la gestion de puissance de la batterie. Nous proposons une garantie de cinq ans sur le capteur. »
« La vitesse d’échantillonnage de l’élément piézo est meilleure que celle de la technologie MEMS concurrente. Au départ, nous proposions le capteur dans un kit d’exportation. Mais le prix était plus élevé que la solution filaire, trop pour un déploiement complet. »
Les clients recherchent un ROI de moins de six mois. Seule une production de masse pouvait faire baisser le prix. Mais il fallait alors revoir le design.
En 2023, I-care signe son premier gros contrat avec un client américain actif dans l’industrie des métaux. Celui-ci a placé près de 10.000 capteurs sans fil sur plus de 20 sites. Les choses se sont ensuite accélérées. « En 2024, nous avons décidé de fabriquer 100.000 capteurs sur notre propre ligne de production automatisée à Mons. »
Scope et business model
L’étendue du déploiement est déterminée avec le client. Ce ne doit pas toujours être prédictif. Le technicien se rend ensuite sur le site pour placer les capteurs. Il s’agit de fixer un support avec un pied sur l’équipement tournant (moteurs, pompes, …) et d’y visser le capteur. Un aimant peut également être utilisé. Le placement est rapide, mais le capteur peut bouger, ce qui fournit d’autres données. « Nous avons une grande expérience dans ce domaine. Il est primordial que le capteur reste au même endroit. »
« Nous appliquons la haute résolution pour détecter une défaillance à un stade précoce. » Une analyse du spectre de données peut révéler précisément ce qui ne va pas. L’IA détecte un comportement anormal et l’analyste peut recommander une action. Cela permet à l’IA d’apprendre à nouveau. « From data to decision. »
Dans le passé, le modèle économique était basé sur le coût de l’actif. Aujourd’hui, I-care propose un modèle de capteur avec un abonnement mensuel par capteur. Tout est compris, du placement du capteur à la première génération de données et au rapport final avec lequel d’I-care établit une base de référence, les seuils d’alarme et les KPI ainsi que des recommandations pour chaque équipement. « Généralement, nous obtenons des tendances au bout d’une à deux semaines. » Le capteur communique avec la passerelle via un open thread (2,4 GHz) qui envoie les données au cloud via la 4G. « Tout est rassemblé sur notre plateforme IA :
I-see. » Le client suit chaque capteur sur un tableau de bord. Le vert signifie que tout va bien, le rouge indique une défaillance ou une panne. L’IA décrit le type de défaillance et recommande une action d’amélioration. Le client peut comparer divers appareils, usines, sous-traitants, … « Nous pouvons fournir énormément de métadonnées. »
« En 2024, I-care a décidé de fabriquer 100.000 capteurs sans fil sur une propre ligne de production automatisée à Mons » Maxime Limbourg, VP Marketing chez I-care
Connexion avec les systèmes de gestion de maintenance informatisés
« Nous déterminons le nombre de capteurs à placer. En général, un moteur est équipé de deux capteurs, un sur le roulement à rouleaux avant et l’autre à l’arrière, côté drive et non-drive. Nous pouvons précisément savoir où il faut lubrifier, où remplacer les roulements à rouleaux. » Une fois la base de référence définie, nous laissons faire l’IA. L’algorithme analyse les données, identifie les écarts, lève un drapeau rouge … « Notre expert évalue tout cela avant d’émettre un rapport. Nous n’inondons pas le client avec de l’incertitude. S’ensuit une demande ou une recommandation pour une intervention proactive ou une action requise. » Certains clients ont une connexion à SAP, IBM Maximo ou un CMMS. « Nous pouvons alors ajouter un bon de travail. Le client n’a plus qu’à l’approuver pour planifier l’action. Nous recevons ultérieurement un rapport. L’information circule dans les deux sens. »
Diverses technologies, éventuellement d’autres fournisseurs, peuvent être ajoutées à la plateforme API ouverte.
par Luc De Smet
Les résultats parlent d’eux-mêmes
« S’il fallait commercer par une technologie, ce serait la vibration. Les mesures vibratoires révèlent toutes sortes de défauts. Le reste suit. Il y a plus de problèmes mécaniques qu’électriques », déclare l’ingénieur en mécanique Maxime Limbourg (31) qui a rejoint I-care il y a huit ans en tant que reliability engineer. Il a effectué des analyses d’huile dans une centrale nucléaire, a contribué au lancement d’I-care en Italie puis est revenu en Belgique pour travailler dans l’unité Reliability Centered Lubrication (RCL). Depuis quelques mois, il est VP marketing. Il a développé une stratégie. « I-care est bien connue en Europe. Aux Etats-Unis, nous avons 70 collaborateurs et un second siège. Le client a plus facilement un budget pour tout ce qui touche à l’IA. » Aux Etats-Unis, la technologie a atteint une bonne maturité. En Europe, c’est plus inégal. En Belgique, il y a une différence entre le nord et le sud où nous avons plus de ‘moniteurs’. Les entreprises aiment avoir des gens sur place. Il est plus difficile de convaincre les clients existants à passer à la technologie en ligne. Les nouveaux clients sont plus susceptibles d’opter pour la nouvelle technologie. » Certains perçoivent immédiatement la valeur de la solution. « Sinon, nous réalisons d’abord une preuve de valeur. Nous sélectionnons quelques actifs sur lesquels placer un capteur et réaliser une campagne de mesures de quelques mois. Nous laissons parler les résultats. » L’entreprise, qui compte 850 collaborateurs et est active dans diverses industries, se tourne désormais vers l’Asie. « La Chine semble être un marché difficile mais nous y avons des clients, en Indonésie et en Corée du Sud aussi. Nous allons lancer l’activité à Singapour et nous avons un business développer au Japon…