MAINTENANCE À L'HONNEUR
Maintenance Magazine 161 – septembre 2023
De l’eau usée à l’eau potable

La brasserie De Halve Maan a notamment eu recours au crowdfunding pour progresser vers l’autosuffisance en matière d’énergie. (©Ekkow)

Chez De Halve Maan, il est désormais possible de rincer et laver des bouteilles et des fûts avec des eaux usées assainies. (©Ekkow)

La durabilité a aussi été un élément central pour l’installation de refroidissement. D’une puissance frigorifique de 300 kW, le système fonctionne avec de l’ammoniac, un réfrigérant naturel. (©Equans)

La durabilité a aussi été un élément central pour l’installation de refroidissement. D’une puissance frigorifique de 300 kW, le système fonctionne avec de l’ammoniac, un réfrigérant naturel. (©Equans)
PreviousNextLa durabilité est aussi un des fers de lance des services d’entretien. Il ne s’agit pas seulement de s’intéresser à l’énergie mais aussi de plus en plus à l’eau. Elle représente une part importante de l’empreinte écologique, surtout dans les brasseries où l’on utilise de l’eau souterraine en grande quantité dans la production. La brasserie De Halve Maan à Bruges a démontré au travers d’un investissement récent qu’on pouvait faire autrement. Elle a misé sur la durabilité avec des panneaux solaires, une installation d’assainissement et un refroidissement écoénergétique.
Pour la brasserie De Halve Maan, l’approche durable a commencé par un éloignement du centre-ville. Le cœur de la brasserie a certes été maintenu dans les murs de la ville mais pour pouvoir faire face à la croissance (depuis son redémarrage en 2005 avec le lancement de bières comme la Brugse Zot et la Straffe Hendrik, c’est la brasserie la plus prospère du Benelux), l’atelier de mise en bouteilles a été déplacé en périphérie. Au lieu d’acheminer la bière par camion à travers le centre-ville historique, l’entreprise a investi en 2016 dans une canalisation souterraine de plusieurs kilomètres. Un objectif suivant était d’atteindre l’autosuffisance en matière d’énergie. Dans une brasserie, ce processus tourne principalement autour de l’eau. Moins on consomme de l’eau par litre de bière, plus l’empreinte écologique est réduite.
Rendre 70% de l’eau réutilisable
L’installation d’assainissement que De Halve Maan avait en tête n’était toutefois pas ‘de la petite bière’. La barre était placée haute : il fallait que 70% des eaux usées soient reconvertis en eau claire et réutilisable. Non pas pour la production de la bière mais pour le rinçage des bouteilles et des fûts. Ainsi, la brasserie pourrait pomper moins d’eau dans le sol. Au cours de cette transformation, on peut récupérer de la chaleur résiduelle et produire de la chaleur de process. Ce qui permet de générer du biogaz. Suffisamment pour produire aussi 30% de la consommation de gaz et faire un pas de plus vers l’autosuffisance. Le service technique de De Halve Maan a pu compter sur une expertise extérieure. Veolia Water Technologies s’est chargé de l’ingénierie pour intégrer l’installation d’assainissement au sein du site existant. Vewaco a assuré la réalisation mécanique : pompes, aérateurs, systèmes de filtration et toutes les canalisations pour alimenter l’installation d’épuration et lui fournir tous les fluides.
Recherche de financement
Pour le financement de ce projet, De Halve Maan a exploré plusieurs pistes. Comme pour la canalisation de bière, la société a invité le grand public à participer au travers d’une opération de crowdfunding. Tous les participants ont pu venir goûter l’eau lors de l’ouverture de l’installation et éventuellement déguster un verre de Brugse Zot. Les 2 millions d’euros ont été récoltés en 24 heures. Par ailleurs, De Halve Maan a bénéficié d’un soutien du VLAIO via la prime écologie+. Outre l’installation d’assainissement, ceci couvrait aussi la production de biogaz, la récupération d’énergie par la chaleur résiduelle et une installation de refroidissement. « Ces dernières années, l’industrie des boissons a dû faire face à de nombreuses crises. Il n’est pas évident dès lors de faire des investissements dans la durabilité. Dans ces moments difficiles, nous avons eu le soutien du VLAIO, grâce à quoi tout cela est devenu possible et nous avons pu nous lancer dans ces grands projets », dit le gérant Xavier Vanneste.
Refroidissement durable
La durabilité a aussi été un élément central pour l’installation de refroidissement. D’une puissance frigorifique de 300 kW, le système fonctionne avec de l’ammoniac, un réfrigérant naturel. Une installation également tournée vers l’avenir car elle peut aisément être portée à 600 kW. Le circuit de refroidissement secondaire au monopropylène glycol à une température de -5 °C alimente différents processus. Certaines de ces applications refroidissent directement avec le glycol. Pour d’autres processus comme le système HVAC, l’eau glacée est refroidie avec le glycol. Des circuits séparés avec une vanne de mélange permettent d’obtenir des températures spécifiques pour les différents processus de brassage et de mise en bouteille, à commencer par la conservation de la bière dans les cuves de stockage CCT dotées d’une chemise de refroidissement à -1 °C. La régulation modulée de la pression d’aspiration et de refoulement garantit un rendement optimal de l’installation de refroidissement. La chambre chaude à 22 °C pour la fermentation secondaire sur la bouteille est chauffée avec de la chaleur de récupération de l’installation de refroidissement. En surveillant tout cela à distance et en intervenant en première ligne, il est possible de réduire sensiblement l’empreinte carbone du refroidissement ainsi que le TCO.
Améliorer encore la durabilité
De Halve Maan continue de travailler sur la durabilité. « Nos employés restent vigilants, il y a toujours une marge d’amélioration », dit Vanneste. « En fait, la durabilité est une mentalité, une préoccupation quotidienne. Nous regardons toujours sur quels points nous pouvons encore nous améliorer. » Par exemple, la brasserie étudie une façon de rentabiliser encore plus les retours de vidanges. « Nous voulons inciter les gens à renvoyer le verre réutilisable à la brasserie. C’est une approche économiquement intéressante et aussi plus durable. Nous nous y consacrons plus que jamais. »
Par Valérie Couplez