MAINTENANCE À L'HONNEUR  
Maintenance Magazine 159 – mars 2023

Synergie entre maintenances préventive et prédictive

Maintenance 4.0 chez Galloo

Stimulé par de grandes ambitions de durabilité, le secteur du recyclage connaît une croissance inédite depuis quelques années. Chez Galloo, une entreprise familiale active dans le monde entier, ils observent également une croissance régulière des volumes et types de métaux à recycler, ce qui les oblige à agrandir et diversifier sans cesse leur parc machines. Pour gérer tout ces actifs, Olivier Courtois, le responsable technique, conduit l’entreprise dans la transition vers la Maintenance 4.0.

Par Elise Noyez

Galloo, qui était finaliste de l’élection de l’Entreprise de l’Année en 2022, est depuis 84 ans spécialisé dans le recyclage des métaux ferreux et non-ferreux. L’entreprise collecte des déchets d’usine et des articles de consommation usagés sur 43 sites en Belgique, aux Pays-Bas et en France, mais le cœur de l’activité se situe à Menin, en Flandre-Occidentale. Ici, sur les sites Ropswalle et Ringlaan, les matériaux broyés sont transformés en matières premières secondaires propres à l’aide de diverses techniques de séparation. Avec ce procédé, Galloo se fixe un objectif de 100% de valorisation, sans perdre de vue les aspects écologiques et économiques.

Plan de maintenance préventive comme base

Olivier Courtois est chargé de la maintenance sur les deux sites de production et dispose pour cela d’une équipe comptant pas moins de 35 techniciens. Répartis dans plusieurs équipes naviguant sur les deux sites, les techniciens travaillent 24/7. Ropswalle, le plus grand site avec plus de quinze grosses machines, est leur point d’attache. Courtois explique le mode de travail : « Un plan de maintenance préventive détermine depuis toujours une grande partie de nos activités. Les machines critiques sont arrêtées une fois par semaine pour réaliser la maintenance, et les autres machines seulement tous les quinze jours, ou même une seule fois par mois. La fréquence exacte dépend par ex. du tonnage traité, de l’usure de certaines pièces et de l’importance de la machine dans le procédé de production. » La maintenance préventive consiste à lubrifier les machines, régler les tapis roulants, réparer les conduites et remplacer les pièces d’usure comme les tamis et les plaques d’usure. C’est également le moment idéal pour une inspection approfondie. « La maintenance préventive, combinée aux rondes d’inspection quotidiennes, permet de détecter certains problèmes, comme par ex. une roue motrice défaillante, et d’intervenir en temps utile. »

« Les capteurs permettent de collecter beaucoup de données, mais il faut encore être capable de les interpréter correctement. C’est la condition pour pouvoir mener ensuite les actions nécessaires. »

Transition progressive vers une maintenance prédictive

Pourtant, après son entrée en service chez Gallo, Courtois a rapidement constaté qu’une maintenance préventive et basée sur l’inspection ne permettait pas d’exclure les arrêts non planifiés. « Suite à la croissance du parc machines, nous n’arrivions plus à tout contrôler et avons dû rechercher des moyens pour évaluer et suivre l’état de nos machines de façon fiable et efficace. Ainsi, il y a 4 ans, nous avons commencé à faire des mesures de vibrations sur tous les moteurs tournant à haut régime, puis, au fur et à mesure, nous avons encore ajouté d’autres mesures et analyses. » En résumé, Galloo utilise aujourd’hui un collecteur de données de vibrations et un spectromètre avec des capteurs sans fil mobiles ou fixes sur les moteurs et les pompes. En plus de cela, ils utilisent des systèmes de lubrification automatiques, réalisent des mesures thermographiques sur les armoires électriques, possèdent des caméras de détection de dégâts sur les conduites et réalisent chaque année une détection de fuites d’air comprimé. La nature et la fréquence des analyses sont toujours ajustés selon le degré d’importance des machines et des pièces pour la production. « La maintenance prédictive met l’accent sur les machines tournant à grande vitesse, comme les ventilateurs, les pompes et les moteurs de broyeurs. »

Synergie

Courtois illustre les synergies entre les maintenances préventive, prédictive et basée sur l’inspection en prenant l’exemple du Flot, une machine qui sépare par ex. l’aluminium des autres métaux lourds par un procédé de flottation. « Le Flot est une de nos machines les plus critiques, d’abord parce qu’elle traite environ 9.000 tonnes de matériaux par mois, et ensuite parce qu’on y ajoute des produits très corrosifs et abrasifs qui, en plus, durcissent rapidement en cas d’arrêt, ce qui pose un risque de colmatage. » C’est pourquoi le plan de maintenance préventive prévoit d’examiner et remplacer les pièces d’usure du Flot chaque semaine, tandis qu’au niveau prédictif il est prévu d’effectuer chaque mois un contrôle thermographique de l’armoire électrique et d’équiper toutes les pompes et moteurs de capteurs ABB intelligents. « Ceux-ci suivent la température, les vibrations, la vitesse … Je peux tout suivre via une application qui m’envoie automatiquement une notification si une valeur seuil est dépassée. C’est le signal indiquant qu’il faut exécuter sur place une analyse de spectre détaillée pour identifier la cause du problème et trouver une solution adaptée. Ainsi, nous évitons les pannes de moteurs et de pompes, et bien d’autres problèmes indirects. »

Mieux utiliser les données de suivi

En termes de dégâts indirects, Courtois estime que Galloo a déjà récupéré deux fois l’investissement dans les diverses solutions de mesure et d’analyse. « Et ce calcul ne prend même pas en compte les arrêts de production qui ont ainsi pu être évités. Le gain financier est donc encore bien supérieur. » Courtois réfléchit désormais à doubler le nombre de capteurs intelligents de 20 à 40 unités. Mais ce n’est pas la première priorité. « Il est facile de collecter beaucoup de données, mais cela n’est réellement utile que si l’on peut en faire quelque chose. Il faut encore pouvoir analyser et interpréter correctement les données, pour ensuite mener les actions appropriées. Cela exige non seulement d’avoir la formation et l’expérience requises, mais aussi le temps nécessaire. Ajouté à mes autres tâches de responsable technique, cela devient vite excessif. C’est pourquoi nous voulons d’abord recruter un responsable fiabilité, qui sera en charge de la maintenance prédictive et proactive. Ce n’est qu’ensuite que nous pourrons réfléchir à élargir le système. La priorité aujourd’hui n’est donc pas de générer plus de données, mais plutôt d’en tirer un meilleur parti. »