PRÉFACE  
Maintenance Magazine 158 – novembre 2022

La maintenance comme arme stratégique

La hausse des prix de l’énergie exerce une forte pression sur notre économie. Les entreprises à haute intensité énergétique sont particulièrement touchées : 25% des grands consommateurs sont déjà en perte d’exploitation. Par conséquent, de nombreuses entreprises décident d’arrêter partiellement la production ou de fermer des départements. Et ce n’est malheureusement que le début ...

Les augmentations des prix du gaz et de l’électricité sont le résultat d’une offre toujours plus réduite sur le marché de l’énergie. Ce n’est pas simplement le résultat sans équivoque de la guerre en Ukraine. La France, qui possède le plus grand parc nucléaire d’Europe, doit actuellement acheter de grandes quantités d’électricité pour éviter les coupures de courant. En septembre, pas moins de 32 de ses 56 réacteurs nucléaires étaient arrêtés pour maintenance. Il apparaît tout simplement qu’il n’y a pas assez de personnel qualifié disponible pour effectuer les travaux nécessaires. En Belgique aussi, la production d’électricité est soumise à de fortes pressions. Avec la fermeture de Doel 3, 1.000 MW de capacité de production ont déjà été perdus, et en février prochain, encore 1.000 MW disparaîtront avec Tihange 2. Tout cela rend notre système énergétique particulièrement vulnérable. Une défaillance technique dans une centrale électrique pendant l’hiver prochain pourrait déjà avoir de graves conséquences.

La maintenance comme arme

Depuis le début de la crise ukrainienne, la maintenance a été utilisée comme un levier pour déstabiliser le marché européen de l’énergie. Par exemple, on a invoqué des causes techniques pour empêcher la mise en service du gazoduc Nordstream 2. Début septembre, Gazprom a annoncé que Nord Stream 1 ne pouvait pas être redémarré après les travaux de maintenance en raison d’une fuite d’huile dans l’une des turbines à gaz de la station de compression. Ce ‘problème technique’ a entraîné de nouveaux prix records sur le marché du gaz. Fin septembre, les deux pipelines ont été gravement endommagés par une série d’explosions sous-marines. Il est tout à fait clair que la Russie gère ses actifs énergétiques de manière très stratégique, c’est le moins qu’on puisse dire.

Se battre

Il est donc plus que jamais nécessaire que les entreprises s’arment contre la hausse des prix de l’énergie et la diminution de la sécurité d’approvisionnement. Nous pouvons utiliser la même arme à cet effet : une politique de maintenance et de gestion des actifs stratégique. Le département technique peut réaliser des projets d’amélioration de l’énergie, mais aussi lutter contre le gaspillage d’énergie dans les installations existantes. Pensez à l’élimination des fuites d’air comprimé, à la lubrification optimale, au nettoyage des échangeurs de chaleur, à la réparation ou au remplacement des purgeurs de vapeur non étanches ... Aujourd’hui, la maintenance n’est pas seulement la clé d’une meilleure compétitivité et d’une plus grande durabilité, elle est aussi une arme stratégique. Il va sans dire que c’est d’autant plus vrai pour les équipes techniques qui se trouvent cet hiver à l’avant-garde pour assurer la fiabilité de l’approvisionnement énergétique de notre pays.

Wim Vancauwenberghe, Évangéliste de la maintenance et directeur de BEMAS