NUMÉRISATION
Maintenance Magazine 162 – décembre 2023
Votre maintenance est-elle déjà passée au numérique ?
Le smartphone est courant, la maintenance prédictive est en hausse

Mark Haarman: « La numérisation peut être un trajet intensif. Le message est donc : persévérez et soyez patient. » (©Mainnovation)

Mainnovation et PwC ont inclus une ‘Feuille de route vers la numérisation’ dans le rapport final. Les entreprises y découvrent les grandes étapes menant à une implémentation réussie de la technologie numérique. (©Mainnovation)

Avec un score de 39%, la maintenance mobile est l’innovation numérique la plus largement implémentée et appliquée. (©Mainnovation)
PreviousNextLa numérisation prend du temps et nécessite un plan d’approche global. Pour de nombreuses entreprises, l’implémentation des technologies numériques reste au stade de la phase pilote. C’est ce qui ressort de l’enquête réalisée par les bureaux de conseil néerlandais et belges Mainnovation et PwC auprès des 127 entreprises de quatre pays européens dont la Belgique, et l’Afrique du Sud.
Par Elke Lamens
L’utilisation fréquente d’applications sur le smartphone, le gps dans la voiture, la domotique à la maison, les chatbots sur les sites web et les scanners dans les supermarchés montre que les technologies numériques jouent un rôle important dans la vie quotidienne. Dans l’industrie, la numérisation est considérée comme une solution au manque de personnel, à l’amélioration de la disponibilité et à la réduction des coûts. « Les entreprises entendent et lisent beaucoup de choses sur les effets de la numérisation et considèrent l’implémentation d’une technologie numérique comme un objectif important mais nombre d’entre elles restent bloquées à la phase pilote », déclare Mark Haarman, managing partner chez Mainnovation.
Zoom sur les tendances numériques
Lors de l’enquête internationale, les chercheurs se sont penchés sur cinq tendances numériques : la maintenance mobile, la maintenance prédictive, la réalité augmentée, l’impression 3D et le jumeau numérique (réplique virtuelle d’un objet physique). Les nouvelles technologies numériques peuvent apporter une grande valeur ajoutée aux services de maintenance et de gestion des actifs. Il a été demandé à 127 entreprises en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Norvège et en Afrique du Sud, dans quelle mesure elles les utilisaient. En outre, des entretiens ont eu lieu avec des acteurs hautement performants : le Port de Rotterdam, Shell, PepsiCo et une société minière en Afrique du Sud. Pour pouvoir comparer les résultats et tirer des conclusions, les entreprises ont été réparties dans cinq catégories : secteurs alimentaire et pharmaceutique, fournisseurs de service, industrie manufacturière, industrie de process lourde, infrastructure & gestionnaires de flottes.
La maintenance avec un smartphone
Avec un score de 39%, la maintenance mobile est l’innovation numérique la plus largement implémentée et appliquée. Haarman n’est pas surpris: « Par rapport aux autres technologies étudiées, c’est la plus avancée. Depuis le lancement de l’iPhone en 2007, le développement d’applications et de technologies mobiles a décollé. C’est un fait en termes d’équipements, de wifi disponible et de sécurité. Et cela profite à la maintenance mobile. Le smartphone est devenu un appareil utile dans l’usine. De plus, le développement et la professionnalisation des systèmes Enterprise Asset Management (EAM) ont conduit à des applications de maintenance plus fiables, plus sûres, plus conviviales et plus précieuses. Les secteurs infrastructure & gestionnaires de flottes (50%) et fournisseurs de services (48%) appliquent le plus la maintenance mobile. «C’est logique car les besoins en solutions mobiles y sont les plus importants. Les collaborateurs parcourent le pays pour livrer et installer ces services dans les entreprises. Un élément surprenant est que la technologie est également bien appliquée dans l’environnement industriel, le taux d’implémentation dans le secteur alimentaire et pharmaceutique étant élevé (50%). Dans la majorité des entreprises, elle est déployée pour enregistrer les bons de travail (70%) et lors d’inspections (42%). »
Disponibilité maximale
Avec 17%, la maintenance prédictive suit en tant que technologie numérique la plus prometteuse et en plein essor chez les entreprises. Elle est conçue pour détecter les modèles de défaillance des machines et aider à prédire quand une maintenance doit être réalisée. La technologie de maintenance prédictive permet d’effectuer une maintenance ‘just in time’. D’une part, les entreprises exploitent le potentiel de l’installation et, d’autre part, elles évitent une détérioration accélérée, voire une panne imprévue des machines. « Nombre d’entreprises y voient un modèle de revenus. Elles ne se contentent pas de fournir les machines mais vendent également un abonnement de maintenance qui prédit numériquement l’entretien. Le grand avantage est qu’elles installent les mêmes machines partout et collectent énormément de données grâce aux inspections périodiques et à une surveillance continue en temps réel. L’analyse complète des données est la clé du succès. En comprenant les données et en les combinant à d’autres données, il est possible d’avoir des prédictions réalistes. »
Minimiser les temps d’arrêt, moteur de la numérisation
L’amélioration du temps de fonctionnement, permettant de maximiser la disponibilité technique, est une raison importante pour laquelle les entreprises adoptent les technologies numériques, à l’exception de l’impression 3D. « Les entreprises souhaitaient réduire autant que possible les défaillances et, si nécessaire, les résoudre rapidement. La réduction des coûts est un autre argument qu’elles évoquent souvent. Si le service de maintenance peut y contribuer, cela conduit indirectement à un meilleur résultat d’exploitation », souligne Haarman. L’enquête montre également que plus de la moitié des entreprises interrogées n’ont pas l’intention d’explorer et/ou de mettre en œuvre un jumeau numérique (53%), la réalité augmentée (58%) et l’impression 3D (58%). « Le fait que la maintenance mobile soit la plus établie était une hypothèse attendue et l’enquête a confirmé. La percée de la maintenance prédictive prévue en 2018 ne s’est pas encore concrétisée en 2023. Ce que nous avions anticipé, c’est que les entreprises s’intéresseraient plus aux drones, au même niveau que la maintenance mobile (39%), mais ce n’est le cas que pour 13% des entreprises. »
Manque de données solides
Qu’est-ce qui empêche les entreprises d’adopter pleinement les technologies numériques, à l’exception de la maintenance mobile ? « Les innovations requièrent d’autres compétences. Les analystes de données et les ingénieurs en fiabilité sont les profils les plus recherchés sur le marché de l’emploi aujourd’hui. La pénurie de ces profils freine l’implémentation dans les entreprises. En conséquence, elles ne sont pas en mesure de les déployer. Voilà pourquoi l’introduction de la maintenance prédictive, mais surtout la RA, le jumeau numérique et la 3D restent dans une phase pilote. Les innovations technologiques comme la RA étaient considérées comme un beau projet technique il y a dix ans, mais les entreprises sous-estiment souvent la mise en œuvre effective. Pour y parvenir, elles doivent modifier les processus métier et les modèles de rôle et introduire des adaptations IT. Même en Norvège, où la numérisation est plus avancée qu’en Belgique et aux Pays-Bas, les entreprises ont du mal à introduire les technologies numériques. » Selon Haarman, l’implémentation dépend des ensembles de données solides. « Outre le manque de collaborateurs dotés de compétences adéquates, les données de l’entreprise ne sont souvent pas en ordre. Bien souvent, il manque une solide analyse de rentabilité. Les entreprises ne peuvent pas montrer à l’avance ce que l’implémentation d’une nouvelle technologie numérique va apporter. Une solution consiste à apprendre des premiers utilisateurs. L’un des acteurs les plus performants interrogés parle ouvertement d’une ‘approche par essais-erreurs’ et souligne que la numérisation peut être un processus intensif. Le message est donc : persévérez et soyez patient » conclut Haarman. À cet égard, Mainnovation et PwC ont inclus une ‘Feuille de route vers la numérisation’ dans le rapport final. Les entreprises y découvrent les grandes étapes menant à une implémentation réussie de la technologie numérique.