PRÉFACE
Maintenance Magazine 162 – décembre 2023
Une industrie et une conscience
Un communiqué de presse reçu en octobre a retenu notre attention: SmartFactory-KL met fin à ses activités sur la plateforme des médias sociaux X. Ce réseau regroupe une cinquantaine d’entreprises et d’instituts de recherche allemands dont de nombreux noms du monde de l’automatisation : B&R, Hannover Messe, KSB, Pilz, Rexroth, Rittal, TÜV Sud … pour n’en citer que quelques-uns. Il s’appuie sur des faits et des études et ne veut plus rien avoir à faire avec la désinformation de l’ancien Twitter. « En notre âme et conscience, nous ne pouvons plus participer à un environnement basé sur des allégations sans fondement, des demi-vérités et des campagnes de diffamation. Les discussions sur la plateforme ne permettent plus d’acquérir de nouvelles perspectives. La communication objective et constructive y est noyée dans les fausses affirmations et les opinions exprimées haut et fort », peut-on lire dans le communiqué.
Un mois plus tard, une liste d’annonceurs disaient adieu à X. Il y a une raison concrète à cela. Pour notamment Disney, Apple, Paramount et Warner Bros Discovery, les déclarations antisémites du CEO Elon Musk ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. L’industrie est-elle en train d’acquérir une conscience ? A en croire la guerre en Ukraine, cela ne s’avère vrai que dans une certaine mesure. Malgré les grandes promesses et les déclarations audacieuses lorsque la guerre a éclaté, moins de 9% des entreprises occidentales ont effectivement quitté la Russie. C’est ce que révèle une étude du site web d’économistes ESB. Les raisons ? « Il est possible que les entreprises trouvent cela trop coûteux, que la Russie mette en place des barrières au départ ou que les entreprises jugent qu’elles puniraient autrement les utilisateurs finaux russes qui n’ont rien à voir avec le conflit armé. »
Ironiquement, mais vrai, la guerre a entraîné l’importation d’une quantité record de gaz naturel liquéfié en provenance de Russie. La plaque tournante est le port de Zeebrugge où un pétrolier transportant du GNL accostait au moins chaque semaine. Mais notre pays est peut-être aussi ennuyé par le déploiement d’armes belges en Russie. Des machines à fabriquer des munitions de la société liégeoise New Lachaussée, dans laquelle la Wallonie détient une participation de 20%, auraient atterri en Russie via un détour par la Serbie. Et ne parlons pas du commerce des diamants russes. La plus grande société d’extraction diamantaire au monde est russe et représente une part importante du trésor de guerre du Kremlin. Ce n’est qu’en janvier qu’il y a eu une interdiction d’importation. C’est la Belgique qui, pendant tout ce temps, a empêché les diamants russes de figurer sur la liste des sanctions.
Il y a donc encore du pain sur la planche. Il faut plus de transparence pour cartographier les flux mondiaux. La technologie pour mieux tracer la technologie. Un passeport diamantaire serait par exemple en cours d’élaboration grâce à la technologie belge. Et les rapports ESG imposés vont au-delà de la seule durabilité. L’abréviation englobe la société et la gouvernance, en plus de l’environnement. Ces éléments devraient contribuer à renforcer l’engagement social. Mais nous avons surtout besoin de plus d’entreprises ou d’organismes comme SmartFactory-KL qui ne veulent pas former une masse silencieuse. Leur conscience est leur boussole, et non les marges bénéficiaires annuelles.