HUMAN RESOURCES
Maintenance Magazine 156 – mai 2022
Comment préparer les collaborateurs à un avenir digital avancé ?

Gianni Cooreman (Salesforce): « Les entreprises ne doivent pas hésiter à investir dans leurs effectifs. » (Photo Salesforce)
PreviousNextLe coronavirus a dynamisé la digitalisation dans les entreprises. Ce profit digital ne doit pas être perdu. Nous aimerions continuer à travailler de manière hybride, en partie à la maison et en partie au bureau. Les entreprises qui cherchent à se réorganiser dans ce sens sont confrontées à un autre défi : une demande persistante de compétences digitales. Plus que jamais, elles doivent investir dans des formations pour préparer les effectifs à l’avenir digital. Une étude récente de l’entreprise technologique Salesforce le confirme. Elle indique que 66% des Belges pensent avoir besoin de telles compétences d’ici cinq ans pour leur travail, mais ils ne savent pas toujours de quelles compétences il s’agit ni comment les acquérir.
Par Elke Lamens
En juillet et août 2021, le bureau d’études de marché iVox de Leuven a interrogé mille Belges à propos de leurs attentes, pour le compte de Salesforce. De quelles compétences digitales et technologiques ont-ils besoin aujourd’hui ? Comment voient-ils évoluer l’avenir? Les répondants travaillent au minimum dix heures par semaine et sont représentatifs en termes de genre, de langue, d’âge et de diplôme. « En tant que leader en CRM, nous veillons à ce qu’il y ait suffisamment de collaborateurs ayant les bonnes compétences digitales », déclare Gianni Cooreman, deputy country leader chez Salesforce Belux, à propos du concept de l’étude.
Déficit de compétences
Déjà tendu, le marché du travail belge est aux prises à un déficit de compétences. Salesforce l’a cartographié avec l’étude. « Il est important de ne pas laisser le fossé digital se creuser et de le réduire autant que possible. Les Belges sont d’accord sur la manière d’agir. Trois sur cinq estiment que leur employeur doit les préparer aux emplois de demain. Un quart estiment que les entreprises IT développant les technologies doivent apporter une contribution ». Deux répondants sur cinq indiquent que les universités et les (hautes) écoles (39%) ainsi que le gouvernement (37%) sont responsables de la formation des travailleurs. Mais d’après plus de la moitié (52%), le gouvernement contribue peu voire pas à la formation des travailleurs pour les emplois de demain. Les entreprises doivent fournir plus d’efforts pour promouvoir une carrière dans le domaine technologique auprès des travailleurs. Trois Belges sur cinq estiment que leur employeur offre des opportunités pour acquérir des compétences digitales. Mais trois sur dix, principalement des Francophones, indiquent n’avoir aucune option pour suivre des formations ou des cours.
Un passeport de compétences digitales
En d’autres termes, les travailleurs externalisent la responsabilité. Ils n’en sont pourtant pas moins concernés. « Ils peuvent prendre des initiatives dans ce domaine », poursuit Cooreman. « Il est possible de créer un Digiskills Passport qui mentionne les compétences digitales que vous avez et vous pouvez tracer une trajectoire de croissance pour votre fonction actuelle ou un emploi auquel vous aspirez. » Agoria le propose. L’organisation a travaillé avec une soixantaine d’experts de pratiquement toutes les branches de l’économie belge. Ceux-ci ont identifié 27 compétences (digitales) qui s’avèrent pertinentes dans un monde en voie de digitalisation et qui gagneront en importance dans les dix prochaines années. Simultanément, de nombreux travailleurs ont des craintes face aux nouvelles technologies, d’après l’étude de Salesforce. « Deux travailleurs belges sur cinq pensent que l’intelligence artificielle (IA) reprendra un jour leur travail. Mais les nouvelles technologies créent aussi de nouveaux emplois. On apprend à travailler autrement, notamment à distance. De quelle manière recherche-t-on de l’information, comment partage-t-on nos connaissances et comment se passe le leadership ? Les nouvelles technologies nous aident à mieux faire notre travail. Voyez la maintenance d’un parc de machines. De plus en plus de technologies digitales sont déployées pour détecter les problèmes et les solutionner. Bien souvent, cela a lieu par le partage de vidéo ou d’écran avant qu’un technicien ne prenne la route. Guider les techniciens via la réalité augmentée et virtuelle est déjà une réalité. Mais appliquer ces technologies demande des compétences digitales. »
Formation continue
La majorité des Belges actifs (76%) – et en particulier les moins de 34 ans (48,7%) – se rendent compte qu’ils doivent développer de nouvelles compétences pour rester à jour. Mais ils perçoivent des obstacles. Le principal semble être le manque de temps. Les formations apparaissent souvent aussi assez chères. Pourtant, la seule voie vers un nouvel avenir digital réside dans un nouvel état d’esprit d’apprentissage tout au long de la vie, d’après Cooreman. « C’est un processus que les entreprises, l’enseignement, le gouvernement et les collaborateurs doivent entreprendre ensemble. Les entreprises ne doivent pas hésiter à investir dans leurs effectifs. Cela devient de plus en plus important au sein de l’organisation de l’entreprise : créer un environnement qui encourage les travailleurs à poursuivre des formations, tout au long de leur vie. Il est moins coûteux pour les entreprises d’investir dans le capital humain et sa plus-value que de courir le risque de voir les collaborateurs quitter l’entreprise ou être moins déployables. » L’enseignement doit évoluer dans ce sens. « Les établissements d’enseignement doivent mieux se consacrer aux compétences spécifiques. Pourquoi les entreprises ne collaborent-elles plus avec les hautes écoles et les universités ? Salesforce a plusieurs collaborations en cours, notamment avec BeCode, Molengeek et la haute école Karel de Grote. Entre aujourd’hui et 2026, nous aspirons à créer 19.000 emplois supplémentaires dans notre écosystème. Pour ce faire, nous examinons la demande du marché et les profils disponibles ainsi que les parties avec lesquelles nous voulons travailler pour atteindre cet objectif. »
Ce qui est inconnu est mal aimé
Cooreman souligne également qu’il y a des opportunités d’e-learning et de micro-apprentissage plus accessibles en termes de coût et de temps. « Mais elles ne sont pas assez connues auprès des entreprises et des travailleurs. De fait, le pas vers le perfectionnement est trop peu franchi. Pour couvrir ce ‘dernier kilomètre’, les options de formation doivent être plus largement connues. Les entreprises technologiques peuvent promouvoir leurs outils de formation et le gouvernement doit jouer un rôle de coordination important en donnant plus de poids, notamment via le site web digiskills ou des subsides. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour combler ensemble la fracture numérique. » Mais la Belgique n’est pas seule dans ce cas. Le problème est mondial. D’après une enquête internationale de Salesforce, 76% des travailleurs dans le monde ne se sentent pas prêts pour un avenir digital. Seuls 28% travaillent effectivement à l’acquisition de nouvelles compétences digitales. Nos voisins du nord ont plus confiance dans leurs compétences digitales. Pas moins de 87% des Néerlandais se sentent au moins assez préparés et un quart (26%) ‘très bien préparés’ aux compétences qu’ils auront besoin dans cinq ans. Les compétences les plus avancées semblent néanmoins être à la traîne. Le fossé entre les compétences digitales que nous utilisons chaque jour et celles que nous avons besoin pour le travail, se creuse. C’est assurément le cas chez les plus jeunes travailleurs. Dans les cinq prochaines années, les technologies permettant le travail collaboratif seront essentielles sur le lieu de travail, d’après l’enquête mondiale.