14/11/2025
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Maintenance Magazine 155 – mars 2022
Pourquoi mesurer la vitesse et comment ?
Les mesures de vitesse permettent le contrôle, le monitoring et la supervision des machines tournantes. En effet, la vitesse optimale d’une machine est synonyme de qualité et d’efficacité en production. Nous consacrons trois articles aux mesures/régulations de vitesse et à la manière dont elles peuvent contribuer à maintenir vos actifs en parfait état. Cette première partie en définit les bases. À quoi servent les mesures de vitesse et quels capteurs sont requis en la matière ?
Par Valérie Couplez
La vitesse peut être définie comme l’allure à laquelle un objet change de position ou comme le rapport de la distance parcourue dans un intervalle de temps donné. Mais lorsqu’il s’agit de machines tournantes, le terme consacré est ‘vitesse de rotation’. C’est la vitesse à laquelle un objet se déplace autour d’un axe fixe ; elle s’exprime en tours par minute (tr/min). Dans toute l’industrie, la surveillance de cette vitesse s’impose.
Pourquoi faire des mesures de vitesse ?
Ces dernières sont cruciales pour la protection et le contrôle des machines tournantes. L’opération semble simple : les systèmes de mesure comptent le temps entre deux impulsions au lieu de compter le nombre d’impulsions par tour. Ce qui rend la mesure de la vitesse de rotation si complexe, c’est la sensibilité aux changements de ces mesures dynamiques à haute fréquence. Dans le cas idéal, l’instrument à disposition permet, en fonction des informations acquises, de monitorer, d’optimiser et de protéger le process. Le monitoring est primordial pour pratiquement toutes les machines tournantes, pour la plus petite bande transporteuse jusqu’à la plus grande turbine. Le contrôle et l’optimisation se font principalement dans le domaine des turbines et des compresseurs. Ces derniers sont typiquement équipés de leur propre système de contrôle de vitesse qui les pilotent au cours des différentes étapes du process (démarrage, opération, réglage et régulation de la charge). Lors du démarrage, un tel système veillera à ce que la dilatation thermique des turbines reste dans les limites de conception et interdira une vitesse de rotation aux fréquences de résonance. En raison de la nature du process, les machines telles que les turbines peuvent entrer en surrégime (overspeed), ce qui peut conduire à des situations dangereuses. Raison pour laquelle une protection de surrégime s’impose. Ce dernier peut rapidement survenir si la machine tourne ou accélère plus vite que stipulé dans les spécifications. Il s’agit fréquemment de systèmes de protection autonomes se déclinant par un niveau de protection indépendant.
Surveillance du surrégime
Les machines tournantes telles que les turbines, les pompes et les compresseurs sont en permanence soumises à des efforts mécaniques importants. Il s’agit de composants critiques requérant une attention particulière. On opte donc pour cette raison pour la surveillance de la vitesse ou de la vitesse de rotation. La protection de la vitesse doit permettre d’éviter le surrégime et les accélérations. Le surrégime se produit lorsque l’arbre de la machine tourne plus vite que sa structure ne peut réellement le supporter. Étant donné que les forces s’accroissent de manière exponentielle avec la vitesse de rotation, le risque existe que des pièces se détachent, se déclinant par des conséquences catastrophiques pour les personnes, les process et l’environnement. Un système de surveillance du surrégime veillera à ce que la vitesse reste dans certaines limites. Si ces valeurs prédéfinies sont franchies, la machine s’arrête instantanément. Selon les exigences de la directive machine et des bonnes pratiques industrielles en vigueur, ces systèmes de protection doivent avoir un temps de réponse inférieur à 40 ms. Une accélération excessive, à son tour, peut entraîner un surrégime d’une machine en rotation et causer une situation dangereuse. En raison de la force d’entraînement présente, il faut un certain temps avant qu’une accélération ne s’estompe. Il est donc primordial d’avoir une connaissance approfondie de sa machine et de connaître les accélérations admissibles pour toutes vitesses. Lors du démarrage d’une machine tournante, l’accélération doit être un paramètre à surveiller en fonction de l’énergie absorbée. Contrairement à la surveillance d’un surrégime, celle de l’accélération se focalise non seulement sur la vitesse de rotation, mais également sur l’accroissement du régime dans un intervalle de temps prédéterminé. Si une accélération excessive est détectée, le système de surveillance arrête la turbine.
Surveillance du régime
Il peut arriver qu’en raison de la pression du process, un compresseur tourne dans le mauvais sens. Ceci est principalement dû au fait que la turbine qui entraîne le compresseur est en phase d’arrêt ou n’est pas opérationnelle. Ce phénomène est connu sous le nom de rotation inverse (reversed rotation). Un redémarrage de la turbine avec le compresseur toujours dans cet état est cause de dommages possibles. En effet, la vitesse du compresseur et celle de la turbine vont s’opposer, ce qui peut avoir des conséquences néfastes pour l’accouplement par exemple. Il n’y a pas de danger immédiat pour le personnel. Un deuxième aspect à surveiller est le fluage (creep). Une turbine doit aussi être complètement à l’arrêt avant d’entamer les activités de maintenance. Pour confirmer cet état, des mesures de vitesse sont nécessaires sur une période de temps plus longue que les mesures de vitesse normales car la turbine fonctionne à très basse vitesse pendant le processus d’arrêt. Enfin, un troisième élément est la sous-vitesse. Pour garder l’installation opérationnelle, une vitesse de rotation minimale doit être maintenue. La sous-vitesse est hautement indésirable pour des raisons de sécurité d’une part et de perturbation du process en production d’autre part ; toutefois sans conséquences aussi désastreuses qu’une survitesse. Des valeurs limites peuvent également être définies ici pour déclencher une alarme et éviter de nouveau aléas.
Quels capteurs utiliser ?
Les mesures sont effectuées à l’aide de capteurs de vitesse. Ceux-ci fonctionnent sans contact selon certains principes de mesure pour cartographier la vitesse d’un objet en rotation. Le choix du bon capteur de vitesse pour l’application est essentiel pour obtenir un résultat précis et fiable. Les paramètres majeurs à prendre en compte sont propres en premier à la machine : vitesses minimale et maximale spécifiées, spécifications du composant à mesurer, limitations en poids et en encombrement au montage, longueur de câble requise. En deuxième lieu, il y a l’environnement : température ambiante attendue, atmosphères explosives, présence de champs électromagnétiques et agents corrosifs environnementaux. Nous comparons ci-dessous les trois grands principes de mesure.
Capteurs à réluctance variable (capteurs VR)
Un capteur VR utilise un champ magnétique pour mesurer les variations de distance entre la pointe du capteur et l’objet cible. Le capteur contient une bobine enroulée autour d’un aimant. Le champ magnétique (flux) de la bobine varie lorsque les dents d’un engrenage passent devant le capteur. L’engrenage mobile initie un flux variable qui induit une tension dans la bobine ; sa fréquence est liée à la vitesse de rotation. Le signal est une onde sinusoïdale dont l’amplitude dépend de la taille de la cible, de sa vitesse et de sa distance. L’avantage des capteurs VR est leur applicabilité à des températures élevées (jusqu’à plus de 300 °C). De plus, ils sont faciles à utiliser et très fiables. Grâce à la connexion bifilaire, ce capteur s’intègre également dans les infrastructures obsolètes. L’inconvénient est que l’amplitude du signal est dépendante de divers facteurs. Si la vitesse est trop lente, si la dent d’engrenage est trop petite ou si la distance au matériau cible est trop grande, le signal sera écrêté et inutilisable. D’autre part, si la vitesse est élevée, si la dent d’engrenage est trop grande ou si la distance est petite, le signal transmettra un nombre d’impulsions élevé. L’application et le positionnement des capteurs VR nécessitent donc une attention et une expertise particulières pour fonctionner correctement. Ils ne conviennent pas à la détection de vitesse faible ou nulle.
Capteurs à courants de Foucault
Un capteur à courants de Foucault utilise un champ électromagnétique pour mesurer les changements de distance par rapport à un objet. Lorsqu’un axe se déplace le long du capteur, ce dernier mesure une variation de distance, soit proche (dent) soit éloignée (encoche). La vitesse de rotation peut être déterminée sur la base temporelle entre les deux. Le grand avantage des capteurs à courants de Foucault est que le principe de mesure indique à la fois les impulsions et la position par rapport aux dents. Cela permet de connaître la distance réglée. Les capteurs à courants de Foucault sont également livrables avec une sortie de courant dynamique, autorisant un câblage long (jusqu’à 1.000 m). Par conséquent, ils sont également moins affectés par l’impédance du câble que les capteurs Hall (voir ci-dessous) et les capteurs VR. L’inconvénient majeur est que lorsque la saturation se produit à grande vitesse, la forme du signal devient de plus en plus écrêtée. Lorsque les dents de l’engrenage passent à grande vitesse devant le capteur, un capteur à courants de Foucault identifiera à peine une différence de distance. Plus la fréquence est élevée, moins un courant de Foucault sera efficace pour les mesures de vitesse.
Capteurs à effet Hall
Un effet Hall ou un capteur Hall mesure les changements dans le champ magnétique de l’aimant, provoqués par le matériau cible ferromagnétique. Les conditionneurs de signal intégrés génèrent un signal carré discriminant. Contrairement aux capteurs VR, les capteurs Hall sont sensibles à l’amplitude du flux magnétique plutôt qu’aux variations de vitesse. Les capteurs de vitesse à effet Hall ont une large plage de mesure et peuvent aussi bien mesurer des composants à rotation lente, stationnaires ou à grande vitesse. La force d’un capteur Hall est qu’il dispose d’une sortie numérique qui peut être facilement transmise et traitée. De plus, ils sont généralement dotés d’un traitement de signal interne. Ce dernier est ainsi numérisé et amplifié, ce qui le rend moins sensible aux perturbations électromagnétiques. Cependant, du fait de l’électronique intégrée, ils sont moins résistants à la température (plage de -40 °C à +150 °C). En outre, ils requièrent une connexion à trois fils. Finalement, le niveau de seuil est prédéfini dans le capteur et ne peut plus être modifié ultérieurement .
Cet article a été réalisé en collaboration avec l’Istec qui a publié un ouvrage sur les mesures de vitesse des machines tournantes. Ce livre examine de plus près le sujet à travers des articles informatifs, des études de cas et un guide complet des bonnes pratiques. Ce livre peut être demandé gratuitement pour les lecteurs de Maintenance Magazine via www.istec.com/mm-speed




