HUMAN RESOURCES
Maintenance Magazine 151 – avril 2021
“Tout le monde a l’opportunité de se réorienter”

Une quarantaine de clients, petits et grands, appliquent cette manière innovante pour repérer et recruter des talents. (Photo TEO)

Bien Vanderstappen, CEO de TEO: « Les collègues considèrent notre approche comme innovante. On parle même de TEO chez PSA à Singapour. » (Photo TEO)

L’atout majeur de TEO est le concept d’apprentissage mixte. La partie théorique est facilement suivie en ligne à la maison. La formation pratique a lieu avec des coffrets didactiques. (Photo TEO)
PreviousNextVous êtes à court de talents ? Créez-en ! Telle est la devise que l’on peut lire sur la plateforme d’apprentissage numérique TEO signifiant Teaching Each Other. Cette startup anversoise propose à quiconque d’apprendre un métier en pénurie. « Suite au corona, nous avons lancé notre concept d’apprentissage plus rapidement que prévu et nous connaissons une belle croissance imprévue », déclare avec satisfaction la CEO Bien Vanderstappen.
Dire que la guerre des talents fait rage revient à enfoncer une porte ouverte. La crise sanitaire rend la recherche de profils techniques plus difficile pour de nombreuses entreprises. TEO a alors lancé son concept. « Notre plateforme d’apprentissage est en place depuis la fin 2018 – début 2019, et suite au corona et aux confinements, le développement des coffrets didactiques avec lesquels nous travaillons s’est accéléré », déclare Bien Vanderstappen. « TEO est né de notre expérience à recruter des profils techniques. Suite à la rareté de certains profils sur le marché du travail, des entreprises commencent à s’intéresser à la formation de leurs collaborateurs. Volvo Cars, par exemple, recherchait une manière adaptée de former des opérateurs. C’est de là qu’est née la philosophie de base de TEO : apprendre des compétences techniques à des candidats via des trajets individuels et un apprentissage mixte (théorie en ligne et coffrets pratiques). »
Une matrice de compétences
« TEO aide les candidats sans connaissances préalables, diplôme ou expérience à acquérir rapidement les bonnes compétences. Une condition à cela : être motivé et vouloir apprendre un métier en pénurie ! » C’est ce qu’on peut lire sur le site web de TEO et cette phrase a tout son sens. « Nous commençons par une évaluation en interne. Le candidat cursiste a-t-il la volonté nécessaire, la capacité et la bonne motivation pour se lancer dans un processus d’apprentissage ? TEO élabore le parcours d’apprentissage. Un des partenaires de TEO a un bagage technique et définit les objectifs d’apprentissage et les directives. Pour le contenu, nous pouvons compter sur le soutien de spécialistes. Le trajet d’apprentissage pour la technologie automobile hybride est par exemple préparé en collaboration avec des enseignants en technologie automobile. » Chaque trajet d’apprentissage se termine par un test. « Tout le monde a sa chance mais en fin de parcours, l’objectif est évalué par rapport à une matrice de compétences. Cette matrice peut être établie par l’entreprise proprement dite, mais TEO dispose aussi d’enseignants techniques en interne. Il s’agit d’une part d’experts actifs dans des entreprises et d’autre part d’enseignants de l’enseignement technique ou supérieur. »
Métiers en pénurie
Les trajets d’apprentissage proposés par TEO dépendent de la demande des entreprises. « S’il y a une grande demande chez diverses entreprises, alors nous élaborons un parcours d’apprentissage. Il peut s’agir de mécanique, d’électricité et de pneumatique. Les techniciens de maintenance semblent être le plus grand métier en pénurie. Il n’y a tout simplement pas assez d’étudiants qui étudient cette orientation et qui disposent du bagage technique utile. Ceux qui obtiennent leur diplôme n’ont bien souvent pas les compétences nécessaires et les capacités que les entreprises recherchent. Le niveau de connaissances n’est généralement pas assez poussé. Il est vrai que les évolutions se suivent à un rythme rapide, voyez la technologie sur les batteries. » TEO reçoit aussi des demandes spécifiques, et l’entreprise cofinance alors le trajet. « Ce qui est bien, c’est que le trajet d’apprentissage n’est pas seulement ouvert aux candidats de l’entreprise spécifique mais aussi aux candidats externes, et nous pouvons parfois même le partager avec d’autres entreprises. Les candidats externes peuvent alors suivre la formation gratuitement. Tout le monde a l’opportunité de se réorienter. »
Des packs mobiles
Pour Bien Vanderstappen, l’atout majeur de TEO est l’apprentissage mixte. « La partie théorique peut facilement être suivie en ligne à la maison. Elle a lieu sur une base individuelle et est suivie de manière flexible à votre rythme. Pour la formation pratique, nous proposons des coffrets didactiques mobiles que les entreprises peuvent louer. Une soixantaine sont aujourd’hui en circulation. » Pour de nombreuses entreprises, ces coffrets didactiques permettent de former facilement leurs collaborateurs. « Elles étaient déjà convaincues sur papier de dispenser des formations à domicile mais elles ne savaient pas comment déployer le volet pratique. Avec TEO, nous proposons une solution concrète avec des packs de formation mobiles. Le seuil à franchir par les entreprises était alors moins élevé. »
De nombreuses entreprises étaient déjà convaincues sur papier de dispenser des formations à domicile, mais elles ne savaient pas comment déployer le volet pratique.
Poursuivre la trajectoire
Après avoir testé cette manière d’apprendre et de recruter… « Volvo est convaincu et ne veut pas revenir au système classique. Volvo avait déjà une ‘academy’ mais elle n’était pas numérique et pas assez flexible. Avec les trajets d’apprentissage et les coffrets didactiques, l’entreprise peut apprendre les compétences utiles aux collaborateurs dans un laps de temps plus court. Nous recevons aussi des signaux positifs d’autres clients. Grâce aux coffrets didactiques, des ‘academy’s’ voient le jour sur des sites d’entreprises, plus rapidement qu’elles n’auraient pu le réaliser elles-mêmes. TEO élabore une trajectoire que les entreprises peuvent poursuivre. Les petites entreprises qui n’ont pas de département spécifique en interne ou qui peuvent investir un budget limité, peuvent néanmoins se lancer. »
International
Dès le début, Bien Vanderstappen n’a jamais caché que la start-up était ambitieuse. Suite au corona, TEO connaît une belle croissance imprévue. Une quarantaine de clients, petits et grands, appliquent déjà cette manière innovante pour repérer et recruter des talents. « Cette année, nous prévoyons de mettre deux fois plus de coffrets didactiques en circulation. La principale raison d’être de TEO est le désespoir des entreprises qui ne trouvent pas de collaborateurs adaptés via le parcours classique. Cela a un impact sur leur production mais aussi sur les plans de croissance. Dans notre pays mais à l’étranger aussi, les entreprises sont confrontées au même fossé entre l’offre de collaborateurs et la demande croissante. »
Les premiers pas aux Pays-Bas sont faits et l’Allemagne est dans le radar en vue d’une extension. « C’est planifié pour 2022-2023. Nous n’avons pas rencontré de TEO similaire aux Pays-Bas et en Allemagne. Les collègues considèrent notre approche comme innovante. On parle même de TEO chez PSA à Singapour », signale Bien Vanderstappen, optimiste. Outre PSA, Volvo et Umicore ont investi dans la plateforme numérique de TEO.
Demandeur d’une collaboration avec l’enseignement
Si TEO a des ambitions internationales, elle perçoit cependant aussi l’énorme potentiel dans notre pays. « Les entreprises souhaitent que l’enseignement compense le manque de collaborateurs correctement formés. Mais il reste un long chemin à parcourir. Nous voulons aussi collaborer avec l’enseignement. Les coffrets didactiques de TEO sont un complément parfait. L’enseignement technique est confronté au défi majeur d’enseigner la pratique de manière efficace et moderne auprès des jeunes et de la rendre plus attrayante pour moderniser l’image. »
Par Elke Lamens